J’ai eu l’impression lors du voyage de cette année dans 22 pays d’Europe et du Moyen-Orient que de rares pays commencent à prendre conscience des enjeux. La Turquie a subi un électrochoc lorsque sa capitale a été privée d’eau pendant 2 mois l’été dernier. La France panse ses plaies après la dizaine de millier de morts dus à la canicule. Mais les politiques mises en place sont plus que timides et l’ouverture du Grenelle de l’Environnement, pour prendre un exemple, nous montre comment les politiques peuvent enterrer proprement un projet qu’on laisse entre leurs seules mains. Au niveau local, les pouvoirs publics agissent de même, se cachant trop souvent derrière des actions ponctuelles certes exemplaires mais sans réel impact.

Les militants commencent à se regrouper. J’ai été au camp climat allemand, en aout à Hambourg, j’ai été aux ateliers-débats à Paris en novembre et participé à Poznań à la COP14 en décembre avec des membres du réseau pour « une justice climatique maintenant ». Les ONG, activistes, de gauche, humanitaires, anarchistes, écologistes et autres font un travail d’analyse en commun. Espérons que leurs campagnes auront la force de leur conviction, car nous avons besoin de ces lanceurs d’alertes maintenant, et de leur pouvoir de mobilisation.



Je vais vous faire un paragraphe aussi sur les entreprises. Je mets de côté les TPE-PME, nécessaire à une vie locale. Il reste ces multinationales, aussi riches et puissantes que des états, et capable d’influencer les gouvernements d’une manière autrement plus efficace que ne le peuvent nos pauvres ONG. Je suis convaincu que la lutte contre le capitalisme et le changement climatique ne font qu’une, tant les efforts de production-médiatisation-consommation sont liés aux émissions de gaz à effet de serre et au blocage des actions de changement que nous pourrions enclencher.

Que nous disent les scientifiques ? Al Gore, un homme politique américain co-prix Nobel de la Paix avec le GIEC, appelle à l’espoir. Nous devrions reconstruire une économie ‘verte’ compatible avec la survie de l’homme sur terre. C’est le désormais célèbre objectif des +2°C de hausse mondiale des températures durant le 21ème siècle promu par les ONG du Réseau Action Climat, ou les 350ppm de dioxyde de carbone dans l’atmosphère poussé par les Anglo-Saxons.



C’est selon moi une douce illusion, potentiellement mortelle. Je reprends des extraits d’un article du Guardian du 15 décembre.

Le niveau de CO2 est actuellement de 380ppm, soit 280ppm de plus qu’à l’époque de la révolution industrielle, et il augmente de plus de 2ppm par an. La position officielle est que la communauté internationale devrait avoir pour objectif de limiter cette élévation à 450ppm.
Anderson, un expert au Tyndall Center for Climate Change Research de l’Université de Manchester. Il a averti qu’il serait « improbable » que les niveaux puissent être limités à 650 parts par million (ppm).
A 650ppm, les recherches actuelles indiquent que le monde pourrait fait face à une augmentation catastrophique de la moyenne des températures de 4°C (note : le haut de la fourchette selon les prévisions du GIEC).
Bob Watson, le scientifique en chef du Ministère de l’Environnement britannique et l’ancien président du GIEC, avertissait cette année que le monde devait se préparer à une augmentation de 4°C, ce qui éliminerait des centaines d’espèces, créerait des pénuries de nourriture et d’eau dans les pays vulnérables et causerait des inondations qui déplaceraient des centaines de millions de personnes.



Comment conclure ? Les mouvements de résistance ont toujours eu lieu, mais je ne suis pas très au point sur l’histoire des révolutions. C’est pourtant la deuxième étape que nous devons entreprendre pour l’égalité des chances de survie sur notre planète.

Je vais partir en 2009 en Asie en ayant conscience que notre société est suffisamment puissante pour s’autodétruire. Les états sont trop faibles pour défendre leur population face aux intérêts du capitalisme. Ils ne feront au mieux qu’essayer de s’adapter aux impacts du changement climatique en promulgant de nouvelles lois sécuritaires afin de bloquer autant que possible l’afflux des centaines de milliers de réfugiés climatiques. Les états essaieront de gérer le chaos causé par la déplétion du pétrole avec des moyens financiers réduit par les coûts astronomiques des dégâts causés par les nouveaux risques naturels sur leur territoire.



Pessimiste mais pas défaitiste, je crois que nous pouvons agir en connaissance de cause. Je rencontre encore des personnes qui ne comprennent pas que le climat change, il faut donc les sensibiliser. Celles qui le comprennent ont encore du mal à l’attribuer au système capitaliste, il faut donc leur démontrer. Et enfin, rares sont les personnes qui décident de lutter. En toute humilité, j’espère faire partie de cette dernière catégorie, mais je ne trouve pas facilement le chemin de cette lutte. Je suis certain qu’il passe par une plus grande liberté des individus et par leur organisation. Nous avons besoin d’une plus grande autonomie, y compris énergétique. L’anarchisme me semble ainsi une des voies possibles. Il s’agit de construire un rapport de force, en restant autant que possible dans la non-violence.

Les peuples premiers et les paysans sont les premiers à devoir faire face à la violence du changement climatique imposé par notre société de consommation qui rejettent des milliers de tonnes de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. J’espère que nous n’aurons pas besoin de défendre notre liberté et notre survie sur la planète par la violence.


Source des photos : albums 'portraits'